De l’art dans la science ou de la science dans l’art ?

Rolando travaille dans le domaine de la dynamique des fluides, c’est-à-dire l’étude du mouvement des fluides, et selon Rolando : « là où tous les mouvements sont permis ». Il existe une équation représentant cela, celle de Navier-Stokes, qui met en évidence un équilibre entre trois agents du mouvement : le gradient de pression, la viscosité du fluide, et les forces volumiques. Ainsi en a décidé la science.
Etre scientifique, c’est réussir à décortiquer, disséquer, poser en équation des phénomènes. Mais c’est avant tout observer ! Là se situe le point commun avec l’artiste, qui lui, ne va pas chercher à expliquer mais plutôt mettre en lumière, mettre en avant, exposer une réalité, et exprimer ce que cette réalité lui inspire. Et pourtant, l’artiste et le scientifique partent de la même chose.

Joindre l’exact au beau

Ainsi, pour chaque mouvement de l’équation, ou chaque « action », Rolando a conçu une expérience qui puisse la mettre en valeur. Bien entendu, pour ne pas trahir le dogme de la précision scientifique, le « design d'expériences » s’est révélé fondamental : « C’est là où j'ai surtout mis la casquette de scientifique : il fallait concevoir une expérience qui tienne les contraintes de l'expo (durée, budget, répétabilité) mais surtout qui soit scientifiquement cohérente : c’est à dire dans l'expérience dans l’expérience, savoir piloter le fluide de manière à « donner à voir » l’effet de chacune des trois forces « agent » régissant la dynamique des fluides Ce design d'expériences a d’ailleurs été réalisé avec l'aide de mes collègues de l'ONERA ».

Professionnaliser l’artistique

Après avoir imaginé les expériences, Rolando s’est tourné vers les ateliers du Fresnoy pour la conception des supports.  
En utilisant des fluides non-miscibles (comme l’eau et l’huile) et des systèmes simples de pompes et poulies, ils ont réussi à fabriquer 3 cylindres représentant chacun une des 3 forces pour l’exposition du Fresnoy.

: dans le 1er cylindre, un objet se déplace proche de l’interface entre deux fluides. Grâce aux forces de pression, le mouvement de l’objet va s’imprimer sur la surface du fluide, sans que la surface et l’objet se touchent à aucun moment.

: dans le 2ème cylindre, un objet en forme d’ondes met en mouvement autour de lui deux fluides, de l’huile et de la glycérine. Les forces visqueuses, qui représentent la résistance au changement, donnent à la glycérine un mouvement lourd et lent, et à l’huile un mouvement léger et fluide.

: le 3ème cylindre représentait les forces volumiques, aussi dites forces extérieures. Il montre comment une même force s’applique de façon égale sur deux fluides, mais provoque des résultats différents selon la nature de ceux-ci. Ainsi, dans le cylindre avec de l’eau, de l’huile et de l’alcool, la gravité pousse l’alcool vers le haut, alors que la gravité pousse l’eau vers le bas.

Ainsi, les phénomènes observés dans les cylindres s’expliquent, la poésie et l’esthétique de l’exposition, elles, ne s’expliquent pas. De ces cylindres peuvent donc se dégager de la science, comme de l’art.

Faire son propre parcours

L’ONERA, organisme de recherche publique,  permet aux chercheurs de se frayer son propre chemin : certains enseignent, d’autres publient, d’autres encore choisissent de se donner corps et âme dans un projet scientifique, pendant que certains aiment mieux construire des relations de confiance avec des partenaires industriels. Et Rolando semble lui avoir découvert une option jamais encore envisagée : l’art. Un joli exemple d’accomplissement personnel.