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Atomes froids : première source laser transportable
Alexandre Bresson fait partie de l'équipe qui est parvenue à refroidir des atomes pour la première fois à l'Onera en mars 2003.
Développer de nouveaux instruments de navigation inertielle utilisant la technologie des atomes froids, tel est l'un des objectifs les plus ambitieux fixé au Département Mesures Physiques (DMPH) de l'Onera. L'unité 'Diagnostics Optiques et Plasmas' (DOP) et 'Capteurs et Micro-Technologie' (CMT), que dirigent respectivement Brigitte Attal-Tretout et François Deyzac, ont d'ores et déjà mis au point une source laser transportable qui va faire l'objet de tests au cours des prochaines semaines à l'Institut d'Optique, au sein du Groupe Optique Atomique que dirige Alain Aspect.
De gauche a droite :
Fabien LIENHART, Salah BOUSSEN, Alexandre BRESSON (Onera)
Philippe BOUYER (IOTA)
Arnaud LANDRAGIN (SYRTE)
Alexandre Bresson connaît bien le sujet " atomes froids ". Ingénieur SupOptique embauché fin 2000 comme ingénieur de recherche après avoir réalisé une thèse sur les mesures par fluorescence induite par laser dans l'unité DOP, il a participé en effet à l'initiation des travaux sur ce sujet alors émergent dans cet établissement. Dès mars 2003, les chercheurs de Palaiseau sont parvenus à refroidir des atomes pour la première fois à l'Onera. En France, plusieurs laboratoires réputés mondialement travaillent sur ce thème, en particulier à l'Ecole Normale Supérieure (ENS), dans l'équipe de Claude Cohen-Tannoudji, prix Nobel de Physique, à l'Observatoire de Paris, dans l'équipe du BMN-Syrte dirigé par Philip Tuckey et à l'Institut d'Optique dans le Groupe Optique Atomique d'Alain Aspect. La différence est que ces équipes s'intéressent essentiellement à la physique fondamentale des atomes froids et à quelques applications métrologiques ultimes (horloges atomiques, etc.) au contraire des chercheurs de l'Onera qui se concentrent plus particulièrement sur les applications opérationnelles qu'il est permis d'envisager. " Notre objectif est de développer des moyens qui pourront être intégrés dans des instruments embarqués ", précise le jeune chercheur.
Un nouveau concept de source présentée à CLEO 2004
Pour concevoir un instrument de ce type, il faut déjà disposer d'une source laser très particulière. Aujourd'hui, les chercheurs utilisent des diodes laser pour concevoir ces sources. Néanmoins, ces diodes sont généralement montées sur des éléments mécaniques extrêmement sensibles à la moindre vibration. Un simple pas ou une parole émise les perturbent. Dans ces conditions, impossible d'utiliser de pareilles sources pour un instrument embarqué dans un environnement pratique. Aussi l'équipe de Palaiseau a-t-elle cherché de nouveaux moyens permettant de générer différemment les longueurs d'onde nécessaires. " A l'Onera, nous démarrions alors des réflexions sur l'utilisation des fibres optiques pour répondre à la demande de différents besoins. C'est ainsi que l'idée a germé de générer les longueurs d'onde nécessaires pour le refroidissement des atomes à l'aide de fibres optiques qui sont insensibles aux vibrations ".
Ces travaux, menés sur ressources générales et abondées par un contrat Cnes et dans le cadre de différents stages et d'un soutien émanant du Conseil Régional d'Ile de France et du Conseil Général de l'Essonne, ont permis d'aboutir à la conception d'une source laser transportable. Elle fut présentée pour la première fois lors de CLEO 2004 (Conference on Lasers and Electro Optics) à San Francisco du 16 au 21 mai derniers. " Nous avons présenté nos résultats. Désormais, il nous reste à tester cette source chez nos partenaires des laboratoires de physique fondamentale ", indique Alexandre Bresson. Le premier de ces tests doit se dérouler courant juin au sein du Groupe Optique Atomique, l'expérience étant réalisée en collaboration avec Philippe Bouyer, Chargé de recherche au CNRS, et Yann Lecoq, un post-doc du Cnes. Par la suite, d'autres tests pourraient avoir lieu sur les installations du laboratoire d'Arnaud Landragin du BNM-Syrte ou encore du Laboratoire Aimé Cotton de l'Université Paris-Sud.
Les premières applications dans une dizaine d'années
Actuellement, pour se repérer dans l'espace, un missile ou un sous-marin utilisent notamment des centrales inertielles. Ces instruments qui reposent aujourd'hui sur des technologies classiques pourront être couplés, à moyen terme, à des instruments absolus de haute précision utilisant des atomes refroidis. Dans ce contexte, les chercheurs de Palaiseau semblent avoir pris un peu d'avance en présentant leurs premiers résultats à San Francisco, sur la source laser. " Aujourd'hui, un laboratoire américain mène des travaux dans le but d'aboutir à des applications identiques. L'idée est aussi fortement évoquée par des chercheurs allemands. Autrement dit, l'idée se diffuse progressivement et il est important pour l'Onera d'être bien placé dès à présent», déclare Alexandre Bresson.
D'ores et déjà, le Cnes soutient la suite de ces travaux qui s'articulent principalement autour de deux axes : d'une part une montée en puissance, d'autre part un rétrécissement de la largeur spectrale du laser ce qui permettrait d'envisager différentes applications. " Les applications ? Il faut qu'elles mûrissent. Aussi ne devraient-elles voir le jour que dans une bonne dizaine d'années ". De son côté, la Délégation Générale pour l'Armement (DGA) est également intéressée par le sujet notamment dans le cadre de la gravimétrie embarquée qui fait l'objet d'une thèse dans cette équipe de l'Onera. Aujourd'hui à Palaiseau et à Châtillon, les atomes froids occupent quatre personnes parmi lesquelles un post-doc et un doctorant. Celui-ci, dont le travail est co-dirigé par le directeur du Syrte, travaille plus particulièrement sur le gravimètre atomique. Pour sa part, Alexandre Bresson y consacre également une partie de son temps, ce " multi-tâches " s'occupant par ailleurs des sources, des fibres optiques et des diagnostics, en particulier à l'aide de l'imagerie de fluorescence, sans oublier les conseils précieux qu'il dispense aux jeunes thésards.
Se maintenir dans la course
Tests de la source laser transportable dans un laboratoire de l'Institut d'Optique, thèse dirigée par un chercheur du BNM-Syrte, la stratégie de l'Onera est claire : initier une forte collaboration entre les équipes françaises afin de conduire des projets plus ambitieux autour des atomes froids. " Il s'agit juste de mettre nos forces en commun pour pouvoir notamment répondre à quelques appels d'offres au niveau européen et tenter de bâtir ainsi de grands projets scientifiques ", indique le chercheur de Palaiseau. Par ailleurs, pour tenter de rivaliser avec la recherche américaine dans ce domaine où une poignée de laboratoires disposent de moyens colossaux, il est impératif de rassembler toutes les potentialités, ne serait-ce que pour se maintenir dans la course.
Source laser Onera à base de fibre pour les atomes froids
(en cours d'integration)